JOHN RAMBO de Sylvester STALLONE – 2007 – Etats-Unis
Icône de années 80 et du reaganisme triomphant, John Rambo aura collé à la peau de Stallone autant que Rocky Balboa, son autre création-phare. Tout comme «l'étalon italien», Rambo a eu un tel impact qu'il s'est vite retourné contre son interprète, le coinçant dans un registre fort limité et brouillant la frontière entre personnage et acteur, dans un fâcheux remake de la relation Clint Eastwood/Inspecteur Harry. Et comme il avait clos avec émotion et réflexivité la geste de son boxeur symbole de l'American Dream et du cauchemar qui s'ensuit, Stallone se propose d'achever la saga de notre Viet-vet préféré sur un accord sombre et définitif.
Nerveux et sans compromis, le film est à l'image de son scénario : simple mais efficace. Cadré avec un sens de l'équilibre sans faille entre iconisation et efficience de la narration, le métrage ne souffre que d'une gestion brouillonne de l'espace, prouvant que Stallone n'est tout de même pas McTiernan. 1H20 sans le générique de fin, autant dire que y'a pas de gras. Pourtant le film tache sévère, du sang, des tripes et de la boue. Les scènes de guerre sont parmi les plus hallucinantes jamais filmées et hissent l'armée birmane au rang des pires ordures du cinéma (malheureusement, ça n'en est pas que, du cinéma...). Stallone a su profiter des recherches de Spielberg et Gibson, entre autres, et court-circuite d'emblée (la séquence d'intro composée d'images d'archives) l'ambiguïté inhérente à tout film de guerre (qui plus est estampillé « Rambo »). Sa vision de la guerre est ultra-réaliste jusqu'à l'insupportable. Le message est clair, identique à celui de Spielberg dans son terrassant Munich et énoncé aussi limpidement, et c'est pour ça que Stallone sera lui aussi traité de naïf simpliste : la violence engendre la violence et les idées les plus nobles ne protègent pas du réel.
A cet égard, Stallone revient à la source du personnage : fini le porte-étendard d'un bellicisme anti-communiste, revoici la machine à tuer, le guerrier impitoyable mais profondément traumatisé, hanté par l'atroce vérité qui gît au plus profond de lui, le torturant, le rongeant, et qui explosera dans cet aveu couronnant un formidable montage des scènes traumatiques des précédents épisodes : « je n'ai jamais tué pour mon pays, j'ai toujours tué pour moi... ».
Le dernier plan, aussi discret dans son lyrisme que bouleversant dans son évidence, est l'un des plus beaux adieux cinématographiques que le cinéma de genre US nous ait donné. L'un des plus inattendus, aussi (remember Rambo III...). Donc l'un des plus admirables...